Oui je l’ai regardée. Enfin pas tout.
Je dois d’abord dire que j’ai aimé le jeu des acteurs. Ils sont très humains, que ce soit le psy dans son empathie et sa vulnérabilité ou les patients qui déboulent dans son cabinet avec leurs valises. Mention spéciale à l’adolescente nageuse et frondeuse qui déborde de vérité.
Ceci dit ma première réaction a été plutôt un recul. D’abord parce que j’avais regardé quelques épisodes de la version US, et que je me souvenais de l’original en entendant le texte français. Même s’il y a eu une adaptation, – d’ailleurs assez audacieuse puisqu’elle aborde les attentats jihadistes de Paris -, les dialogues sont en grande partie les mêmes. Je me suis donc trouvé en plein face au paradoxe du comédien : ils sont l’air particulièrement sincères, et pour autant je sais immédiatement qu’ils récitent un texte, pour la bonne raison que je l’ai déjà entendu.
C’est sans doute parce que je suis psy que ça m’a gêné ! Parce que depuis le temps que je regarde des films et que j’assiste à des pièces de théâtre, cela aurait pu me chatouiller bien avant. Peut-être que je me suis senti mal a l’aise à l’idée que ça pourrait m’arriver d’avoir en face de moi, dans mon cabinet, quelqu’un de 100% sincère qui me sort un texte préparé à l’avance ! Vertigineux…
Autre chose m’a gêné sur le fond : le psy est un expert. Il l’est d’ailleurs auprès des tribunaux, et il l’est avec ses patients quand il leur explique ce qui leur arrive avec l’aide de son référentiel théorique. Or je ne suis pas un expert et je ne suis pas sur que c’est une expertise que viennent chercher les gens quand ils ont besoin d’un psy. Cela risque de créer une distance entre un sachant d’une part, et un patient d’autre part, qui attend que le grand spécialiste trouve une solution à son problème.
Mon référentiel a moi se fonde sur un autre parti-pris, d’inspiration phénoménologique. Il se donne comme horizon le point de rencontre, la frontière-contact, et pour y accéder le chemin consiste plutôt à réduire la distance. Au point que Jacques Blaize par exemple, un auteur gestaltiste bien connu, parle de « ne plus savoir » 1. L’idée est d’être simplement présent à son patient, comme si je le découvrais pour la première fois. Ce qui est évidemment impossible…
Pour autant je sais bien que la société a besoin d’évaluations et j’admire les professionnels qui développent ce savoir-faire avec humilité et compassion comme le héros de cette série. Et je trouve intéressant qu’ils puissent devenir des héros populaires ! Donc longue vie à la psy à la télé…